CHRISTMAS BEAUJOLAIS
Décembre 2010
L'histoire se passe dans un charmant petit village du sud Mâconnais, en cette fin d'année 2010. Une famille, le père, la cinquantaine épanouie, que nous appellerons A. la mère F. la quarantaine débordante d'énergie, et la fille L. terminant gaillardement l'adolescence, « fashion » victime, étudiante et pianiste à ses heures, ont décidé d'un commun accord, après moult hésitations, qu'ils traverseraient le « Channel » pour retrouver leur fils M. et sa compagne J. tous deux exilés à Londres, afin de pouvoir passer les fêtes de fin d'année avec eux.
Il faut au préalable vous expliquer que le jeune M. suite à un début d'étude correct dans la capitale des Gaulles où l'on aime, après avoir traversé les traboules, déguster dans d'adorables Bouchons de la charcuterie et du fromage de chèvre arrosés d'un pot de Beaujolais, bien sûr accompagné de J., avait décidé de briser le rythme immuable de sa future destinée d'ingénieur enfermé dans un bureau dans lequel il ne se projetait absolument pas, et de prendre une année sabbatique (qui n'est pas une année réservée à Patrick. Sabatier comme on pourrait le croire), à l'aventure, en traversant la Manche afin de parfaire la langue de Shakespeare : sa devise sera dorénavant : to be or not to be !
Les dates furent définies, les moyens de transports choisis et les réservations faites : ce sera en voiture jusqu'à Lille, puis « Eurostar » pour débarquer le 28 Décembre à Saint-Pancras :- be carefull London, the A.F.L. Familly is back !
Jusque là me direz-vous, rien de spécial, si ce n'est, qu'instinctivement, quand tout va très bien, une mauvaise pensée se glisse dans la tête et vient gâcher cet agréable moment et vous rappeler qu'il y a parfois un petit grain de sable qui, on ne sait pas pourquoi, enraille la belle mécanique et brise net la quiétude et la logique habituelle.
Tout le monde est sur le pont, que dis-je sur le quai. Le début du voyage sur l'autoroute, malgré un brouillard givrant s'est déroulé normalement. En gare de Lille, chargés de leurs bagages, ils se présentent tous les trois pour l'embarquement immédiat pour enfin pouvoir serrer ce fils et ce frère, exilé, dans leur bras, quand soudain l'horizon vient subitement noircir la fièvre du départ, et l'angoisse se lire tout à coup sur leurs visages en entendant le contrôleur leur demander : -
Présentez-moi vos billets et vos pièces d'identités, s'il vous plait Mesdames, Messieurs !-
Pièces d'identités, pièces d'identités, ah ! quel vilain mot, que je n'aime pas ce mot !Et bien dis calmement la jeune L. je ne l'ai pas ma pièce d'identité ! elle est restée dans ma chambre, bien rangée dans son tiroir habituel, tu sais Papa, où tu m'a dit qu'elle serait en parfaite sécurité ! ... par contre j'ai ma carte de bibliothèque !Quoi, qu'es-ce que j'ai encore dit ?
A cet instant précis les nerfs de la mère F. commencent à lâcher : son rêve s'écroule, le constat est sans appel : elle ne serrera pas son fils chéri dans ses bras, l'image de la scène mainte fois revue dans sa tête se brise, l'émotion est trop forte, des larmes commencent à couler, elle qui a pourtant du caractère pour deux a craqué. La panique s'empare également de L. qui constate qu'elle ne pourra pas donner à son frère préféré (elle n'en n'a qu'un) la magnifique surprise qu'elle avait mis toute une journée à préparer amoureusement, et commence à réaliser qu'à près tout, ce qui arrive est un peu de sa faute!
Seul A. garde son sang froid et essaye de trouver une solution. Lui seul n'a pas abdiqué et garde espoir, il est prêt à tout. C'est son côté commercial et l'habitude des négociations. Devant la rupture, devant l'argument qui tue, quand on est le dos au mur, réfléchir et trouver des parades afin de pouvoir contourner l'adversaire. Il n'est pas question de baisser les bras et les causes perdues sont les meilleures chalenges à relever.
Le temps passe et les négociations avancent : avant d'y entrer, on sort petit à petit du tunnel (sans jeux de mots). Les gros nuages disparaissent et le ciel s'éclaircit de nouveau.C'est tranché, ouf : F.retrouve le sourire et avec un peu d'anxiété embarquera bien dans le train comme prévu mais seule.
A. trouve un arrangement avec un contrôleur tolérant et plein de logique, ils s'améliorent à la S.N.C.F. Avec L. leurs billets seront annulés et reportés à demain même heure ce qui leur permettra, pendant ce répit, de faire l'aller retour dans la foulée pour récupérer le petit rectangle cartonné qui empêchait tout voyage à la jeune L. Quelques bonnes bouteilles enfouies dans les bagages, qui devaient rejoindre clandestinement Londres, ont facilité les transactions et ont même permis à A. et à L. de faire l'aller à bord de l'Eurostar en 1ère classe sans supplément, quand je vous disais qu'il devenaient bons à la S.N.C.F. !
L'incident est clos, sans dommages. Sans dommages, oui si l'on veut, sauf que A. pour rallier la Bourgogne au pays de Martine A. aura couvert la bagatelle de 2 500 km et passé 24 heures au volant plus l'aller retour en Eurostar ! Sans parler du coût essence et péages. Mais quand on aime, c'est bien connu, on ne compte pas. Que ne ferions-nous pas pour retrouver un fils, un frère !
Cela leur fera une belle anecdote à raconter à l'apéro devant la cheminée en famille où bien avec leurs amis! Moralité de l'histoire : si ta fille n'a pas de carte d'identité attends toi à ne pas revoir ton fils ! (comprenne qui pourra !)
JPB
Partage